Après 58 ans, (Talon) prépare les 60 ans de notre Nation en devenir

Publié le par Nouveau Courrier

 

Par Roger Gbégnonvi

            La célébration des 58 et 59 ans de notre indépendance sera modeste comparée à celle des 60 ans qui appellentdéjà notre attention, parce que ce chiffre permet un meilleur bilan qui devra lui-même permettrel’élan vers un avenir à mieux construire que le passé. A partir donc de maintenant, nous avonsdeux ans pour un bon bilan, solide piste d’envol.

           

 Après 58 ans, (Talon) prépare  les 60 ans de notre Nation en devenir

Notre bilan en 2020 sera largement positif car rien n’était acquis au matin du 1er août 1960. Ce jour-là, un prêtre français montre à son enfant de chœur uneimage d’Alger et lui dit : ‘‘Regarde la belle ville que nous avons bâtie en Algérie. Et pourtant, ils nous haïssent. Vous voulez les imiter ?’’ Ce jour-là, dans telle région de notre pays, ayant appris que les Français étaient partis, nos concitoyens ont demandé si les Dahoméens aussi étaient partis. Car en 1894, c’est la France qui, ayant vaincu Abomey, a mis dans le‘‘couloir du Dahomey’’ des peuples que rien ne destinait à vivre ensemble. Au mieux, ils s’ignoraient. Au pire, ils s’affrontaient, jouant au jeu de terreur de qui livrerait l’autre à l’esclavagiste portugais. Sous la botte française, tous connurent le sort des espèces taillables et corvéables à merci. Par quatre fois, leur maître les envoya sur ses fronts de guerre servir de chair à canon pour les Allemands, les Nazis, le Vietminh, les Fellaghas. A l’intérieur du couloir, leur vie s’usait en ‘‘effort de guerre’’, impôts arbitraires, et autres saloperiesqui ont fait mentir lesLumières. Après donc la victoire du général Dodds en 1894, c’est à un pays bric-à-brac, sans conscience nationale, que le général de Gaulle fit hypocritement don d’une dite indépendance en 1960.

            ‘‘Peu de pays africains, écrit Robert Cornevin en 1961, ont bénéficié d’un partage territorial aussi magnifiquement absurde que le Togo allemand et le Dahomey français.’’ Donner un sens viable à l’absurde, ce fut le défi que les Dahoméens durent relever, après avoir compris qu’ils étaient dans le couloir pour y vivre ensemble et solidaires et non pour y périr dispersés et adversaires, qu’une guerre civile pour résoudre les graves crises serait une ‘‘abomination de la désolation’’. Car c’est une absurdité abyssale que de réduire en miettes les morceaux du pays évanescent. Car on ne sort jamais d’un abîme. Aussi, avec intelligence politique, les Dahoméens transformèrent le chaos en ordre, firent des morceaux ethniques un pays cohérent, une nation à venir. Intelligence doit s’entendreici au sens demanœuvres, habiletés, compromis,voire compromissions et trahisons (non mortelles). Eviter le pire pour entrevoir le meilleur. Le meilleur,par exemple, du baptême nouveau. ‘‘C’est le seul exemple à ma connaissance, écrit Robert Cornevin, où le nom d’un royaume vaincu ait déterminé l’appellation d’une entité territoriale cinq fois plus grande.’’ Dès lors, quoi de plus normal que tous ne s’y retrouvent pas ? Pour que tous s’y retrouvent, le Bénin advint en 1975.

            Et le Bénin existe. Plus rien ne lui arrivera d’autre que d’être consolidé,constitué en Nation pour toujours. L’Etat béninois doit avoir maintenant l’intelligence politique de mettre à la disposition du peuple béninois les instruments indispensables de son unité inaltérable et de son développement nécessaire. De toutes les mesures techniques envisageables pour cette double fin, la plus urgente, on ne le dira jamais assez, est celle du lien, du liant de l’écriture qui, seule, permet à l’homme de ‘‘lier le bois au bois’’. L’Etat béninois a deux ans pour ordonner l’écriture de toutes nos langues maternelles au nombre sur fait de 62 pour que tous s’y retrouvent. L’Etat béninois a deux ans pour définir quelles sont, au maximum, les quatre langues béninoises, ordonnées nationales par décision politique, et que chaque Béninois scolarisé devra savoir lire et écrire pour être pleinement béninois de l’Atlantique au fleuve Niger. L’Etat béninois a deux ans pour préparer les 60 ans de notre Nation en devenir de façon à faire du Bénin une Nation devenue. Nous nous le devons. Nous le ferons.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article